Art préhistorique dans les Alpes

Vallée des Merveilles © T.Joly
Site préhistorique unique renommé dans le monde entier, la Vallée des Merveilles recèle des milliers de gravures de l’âge du Bronze exécutées dans un magnifique paysage rocheux dominé par des sommets déchiquetés.

[ Pratique ]

Y aller
- Route
80 km depuis Nice par l’autoroute A8 jusqu’à la sortie 59, puis par les D2204, N204 et D91 jusqu’à Saint-Dalmas de Tende. Ou autoroute A8 jusqu’à Vintimille en Italie, puis par D6204, N204 et D91 jusqu’à Saint-Dalmas de Tende.
- Transports publics
Bus SNCF de Nice Saint Roch à Drap-Cantaron, puis train TER de Drap-Cantaron à Tende. Le trajet dure entre 2 heures et 2 heures trente minutes.
Se loger
Chamois d’Or, à Castérino
Les Mélèzes, à Castérino
Le Prieuré, à Saint-Dalmas-de-Tende
Gîte Neige et Merveilles, à La Minière de Vallauria
Refuge des Merveilles, dans la Vallée des Merveilles
Restaurant
Chamois d’Or, à Castérino
Les Mélèzes, a Castérino
Musée Départemental des Merveilles
Ouvert de 10 h à 17 h, jusqu’à 18 h du 2 mai au 15 octobre.
Entrée gratuite.
Tel : 0493043250
www.museedesmerveilles.com
Parc National du Mercantour
www.mercantour.eu
Excursions en 4x4
www.4x4merveilles.com
Informations
- Office de tourisme de Tende
Tel : 0493047371
www.tendemerveilles.com
- Office de tourisme de la Côte d’Azur
Tel : 0493377878
www.cotedazur-tourisme.com
En Europe aussi, les artistes préhistoriques n’ont pas uniquement exprimé leur créativité sur les murs des grottes. À 80 kilomètres au nord de Nice, dans le Parc National du Mercantour, la Vallée des Merveilles et la Vallée de Fontanalbe recèlent plus de 35 000 gravures rupestres datant de l’âge du de l’âge du Bronze, probablement réalisées il y a entre 4 000 et 5 000 ans. La plus importante concentration d’œuvres préhistoriques d’Europe. Un véritable musée à ciel ouvert qui vaut aussi le voyage pour le cadre exceptionnel où il se trouve, en particulier dans la Vallée des Merveilles.


Vallée des Merveilles © T.Joly
 Vallée glaciaire
Ces gravures sont en effet situées entre 2 100 et 2 500 m d’altitude dans une vallée dont les parois sont constituées de grandes dalles multicolores appelées chiappes façonnées et polies par le glacier qui y a tracé son chemin lors du dernier âge glaciaire. De plus, la vallée est parsemée de lacs et entourée par les sommets de L’Arpette, du Mont des Merveilles, du Grand Capelet et du Mont Bégo.
Pourquoi les hommes du Bronze ont-ils patiemment taillé ces dizaines de milliers d’images sur les surfaces rouge sang et violettes apparues après la fonte du glacier ?...
Personne ne le sait avec certitude car la vallée ne fut apparemment jamais habitée. Nichée au milieu de rudes montagnes, elle était trop haute, trop étroite et trop rocheuse pour être cultivable. Ces gravures furent-elles réalisées au fil des siècles par des pèlerins qui montaient là pour vénérer leurs dieux ?... Ou des tribus vivant plus bas faisaient-elles spécialement le voyage jusque-là pour pratiquer des cérémonies religieuses ?..



Vallée des Merveilles © T.Joly
 Connu comme un lieu maudit
Quelle que soit la réponse, le choix de cette vallée est probablement lié à la montagne de 2 872 mètres de haut dominant son versant Est, le Mont Bégo qui est connu pour attirer les éclairs quand des orages éclatent. Un phénomène fascinant dû à la haute teneur en fer et en zinc de son sol.
Combiné à la présence de ces mystérieuses gravures, cela explique pourquoi un voile de superstition fut jeté sur le lieu une fois que le Christianisme devint la religion officielle. L’Église voulant détourner les gens de cette zone dont les symboles avaient des relents de paganisme, plusieurs sites de la vallée furent baptisés de noms ayant une connotation démoniaque : pic et col du Diable, lac Noir, lac Carbon, col de Valmasque qui vient du mot « masca », une sorcière.
Pendant des siècles, seuls quelques bergers y venaient donc en été ainsi que des voyageurs occasionnels qui la traversaient lorsqu’ils allaient de France en Italie. Cependant, réputée être un lieu maudit, une annexe de l’Enfer, elle attirait aussi mages, astrologues et disciples de Satan.



Vallée des Merveilles © T.Joly
 Bêtes à cornes
Gravées sur plus de 4 000 pierres, dalles et blocs, parfois seules, parfois par groupes, ces gravures ont toutes été exécutées par percussion directe sur la roche en utilisant des outils en quartz.
Les plus nombreuses sont les représentations de têtes de bétail cornues habituellement représentées sans détails. De temps à autre, deux de ces têtes sont côte à côte apparemment attelées à une charrue. Le fait que ces animaux sont de très loin le premier sujet des gravures suggère que les croyances religieuses des visiteurs de la vallée avaient un rapport avec un culte du dieu taureau. La seconde catégorie consiste en des symboles tels que des croix, des cercles et des spirales de diverses formes ainsi que des formes ovales ou rectangulaires subdivisées en petits carrés. Elles représentent peut-être des champs cultivés parfois traversés par un chemin ou un cours d’eau, des enclos où le bétail était parqué, des filets ou des pièges.



Le Sorcier © T.Joly
 Figures anthropomorphes
Les armes, essentiellement des poignards et des hallebardes, forment la troisième catégorie principale. Comparées avec des armes de l’âge du Bronze trouvées ailleurs dans des tombes, elles ont permis aux scientifiques de dater ces gravures.
Comme dans tout l’art préhistorique, les figures anthropomorphes sont rares, moins de 1% de toutes les œuvres. De petites tailles, elles sont très schématiques et stylisées, presque toujours montrées en action, avec les bras levés, tenant ou traînant un objet ou une arme. Saisissantes, elles sont aujourd’hui désignées par des surnoms tels que « La Danseuse », « Le Christ », « Le Chef de Tribu » et « Le Sorcier », ce dernier haut d’une trentaine de centimètres semblant faire une invocation au Mont Bégo car il fait face à la montagne.
Enfin, il y a également des milliers de noms, de dates, de dessins et autres sortes de graffitis réalisés au fil des siècles par des voyageurs sans but précis et avec beaucoup moins de talent. Les plus anciens datent de l’époque romaine, les plus nombreux sont du 19e siècle.



Vallée des Merveilles © T.Joly
 Une rude montée
Mais cette incroyable vallée ne révèle pas facilement ses secrets. Tout d’abord, le site est recouvert par la neige huit mois par an et peut seulement être visité de juin au début octobre selon la rapidité avec laquelle la neige fond. Puis, y accéder demande une bonne dose de marche à pied. L’approche la plus facile est depuis le parking du Lac des Mesches, une dizaine de kilomètres après Saint-Dalmas-de-Tende, près de Casterino où quelques hôtels offrent des hébergements confortables. De là, un chemin mène à l’entrée de la vallée, une ascension de 1 000 m qui se fait en 2,5 – 3 heures. Peu après le début, il passe par le hameau de la Minière de Vallauria où se trouve une ancienne mine d’argent, un lac et un gîte. Ensuite vous attend une montée raide à travers une dense forêt de mélèze ponctuée de quelques gorges et cascades. Lorsque vous atteignez une belle vallée sauvage parsemée de rochers avec un petit torrent et un tapis de fleurs, le plus difficile est fait. Le chemin plus ou moins plat mène alors directement au Refuge des Merveilles, un petit bâtiment en pierre situé au bord d’un lac qui offre hébergement basique, restauration et informations sur la vallée.


Vallée des Merveilles © T.Joly
 Musée à voir
Solution alternative, il est également possible de joindre une excursion en jeep 4x4 depuis Saint-Dalmas ou Casterino. Le prix est de 85 € par personne, mais il faut réserver bien à l’avance pour être sûr d’avoir une place.
Néanmoins, vous devrez marcher un peu car les gravures se trouvent un peu plus loin et plus haut que le refuge dans une vallée étroite encore plus sauvage que celle du bas. Pour voir les plus belles et les plus célèbres gravures il faut suivre l’une des visites guidées partant du refuge. Afin de protéger ces œuvres préhistoriques uniques du vandalisme et des vols, les personnes seules ont en effet interdiction de quitter le sentier principal et ne peuvent voir qu’une petite partie des œuvres. Par ailleurs, quelques-unes des plus belles gravures ont été remplacées par des copies et les originales se trouvent désormais dans le Musée Départemental des Merveilles de Tende, une charmante petite ville médiévale de style italien. Dédié à l’histoire naturelle, archéologique et ethnologique de la haute vallée de la Roya, qui inclut le Mont Bégo, il comporte un large espace consacré à la Vallée des Merveilles.


18 Juin 2014
Thierry Joly